lundi 18 février 2008

L'enfant fou

Nourri d’inquiètes certitudes, il ne voyait pas de cratères sur la route. Il tombait, se blessait, mais il se relevait. L’âme écorchée, zébrés les reins, sans cesse, il courait. Le soleil, le vent, la pluie l’étrillaient, l’étreignaient.

Toujours il fixait la touffe du monde qui reculait sous ses lèvres. Des filles nues perlaient dans le soleil. Il se haussait sous les palmes de leurs bras. La caresse n’était qu’un souffle. Les yeux rouverts, il restait seul.

Il enrageait, criait parfois. Mais manquant d’audace, une botte de paille déplacée, malmené sans cesse, il pressait sa réflexion d’un lacet sur la gorge. Pour retourner la solitude contre lui, les forces lui manquaient.

La simplicité lui échappait. Tiraillé sans répit, de la braise écartée. Pourtant les années l’avaient gagné ; demeurait le volcan ; à ses pieds, la tendresse avait monté. La tête au ciel, il souriait, de l’herbe plein les lèvres.

Pierre Perrin
La poésie française contemporaine,
par Jean Orizet, Anthologie, p. 253

11 commentaires:

  1. bonjour françoise , c'est beau cet extrait que je découvre ...
    bon début de semaine et plein de bonnes choses

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  2. Merveilleux cet extrait de l'Enfant Fou. Merci de nous l'avoir partagé.

    Bon lundi et bisous de ta p'tite cousine du Québec.

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  3. Bonjour, Françoise, et merci pour tout...un message ici, un message là...
    Et merci pour ce bel extrait.
    A très bientôt...

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  4. C'est fou!
    C'est nous,
    c'est vous,
    tout le monde il est fou...tu!

    Too Banal

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  5. Bonjour Françoise,

    Très beau texte, vraiment qui porte à la réflexion..

    Où sont les fous? et si la vie n'a de saveur que pour les fous..

    Je le demande.

    Bonne journée à toi.

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  6. On peut quelquefois résoudre des problèmes insolubles, en devenant fou. La folie est comme le tapis merveilleux des Mille et une Nuits. Elle peut vous soulever par-dessus les innombrables considérations mesquines qui obstruent la vie quotidienne.
    (Rabindranath Tagore)


    Merci Moghrama, Rosie, Herbert, Too banal et Mathilde.
    Bonne soirée à vous.

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  7. Merci Françoise pour tes passages ;)
    Je te souhaite une bonne soirée!
    Bises.

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  8. Mais tout le plaisir a été pour moi, Tigwenn :) Bisous.

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  9. Je ne sais pas pourquoi .. (enfin plutôt si.. je crois savoir ..) .. mais ce poème me parle ... Pourtant, depuis quelque temps j'étais devenu très hermétique à la poésie...
    Il doit sans doute rester une once de folie en moi qui me permet de vibrer encore.. un peu...

    Bises.

    Alain

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Laissez moi des petits mots,
j'aime tant les lire... :-)

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FEMMES ET HOMMES

Femmes et hommes de la texture de la parole et du vent qui tissez des tissus de mots au bout de vos dents,
Ne vous laissez pas attacher,
ne permettez pas qu'on fasse sur vous des rêves impossibles...
On est en Amour avec vous tant que vous correspondez au rêve que l'on a fait sur vous,
alors le fleuve Amour coule tranquille,
les jours sont heureux sous les marronniers mauves,
Mais s'il vous arrive de ne plus être ce personnage qui marchait dans le rêve,
alors soufflent les vents contraires,
le bateau tangue, la voile se déchire,
on met les canots à la mer,
les mots d'Amour deviennent des mots-couteaux qu'on vous enfonce dans le coeur.
La personne qui hier vous chérissait vous hait aujourd'hui;
La personne qui avait une si belle oreille pour vous écouter pleurer et rire
ne peut plus supporter le son de votre voix.
Plus rien n'est négociable
On a jeté votre valise par la fenêtre,
Il pleut et vous remontez la rue dans votre pardessus noir,
Est-ce aimer que de vouloir que l'autre quitte sa propre route et son propre voyage?
Est-ce aimer que d'enfermer l'autre dans la prison de son propre rêve?

Femmes et hommes de la texture de la parole et du vent
Qui tissez des tissus de mots au bout de vos dents
ne vous laissez pas rêver par quelqu'un d'autre que vous même
Chacun a son chemin qu'il est seul parfois à comprendre.
Femmes et hommes de la texture de la parole et du vent,
Si nous pouvions être d'abord toutes et tous et avant tout et premièrement des amants de la vie,
alors nous ne serions plus ces éternels questionneurs,
Ces éternels mendiants qui perdent tant d'énergie
et tant de temps à attendre des autres des signes,
des baisers, de la reconnaissance
Si nous étions avant tout et premièrement des amants de la vie,
Tout nous serait cadeau
Nous ne serions jamais déçus
On ne peut se permettre de rêver que sur soi-même
Moi seul connais le chemin qui conduit au bout de mon chemin
Chacun est dans sa vie
et dans sa peau...
A chacun sa texture
son message et ses mots

Julos Beaucarne